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Comprendre le droit pénal routier : les infractions, sanctions et prévention

Présenté comme protecteur des usagers de la route, il peut pourtant parfois paraître contraignant lorsque la sanction vient mettre en péril une vie de famille, un travail… Découvrez au travers de notre série d’articles : le droit pénal routier du point de vue des victimes (indemnisation du préjudice, évolution des infractions…). 

Découvrez également le droit pénal routier du point de vue des auteurs : les infractions routières les plus courantes, les sanctions prévues et les moyens de prévention. Consultez notre Dossier complet sur notre domaine de compétence en droit pénal.

Point sur la proposition de loi visant à créer une infraction d’homicide routier

Dans la mesure où nous sommes de plus en plus nombreux à emprunter quotidiennement notre voiture ou notre vélo pour nous rendre au travail, emmener nos enfants à l’école et pratiquer nos loisirs, la circulation plus dense crée de nombreuses opportunités d’appliquer le droit routier.

Ces dernières années, il est devenu particulièrement important et s’est développé au travers des politiques publiques tendant à tenter d’assurer la sécurité des usagers de la route contre les conduites dites à risque (vitesse excessive, consommation de stupéfiants ou d’alcool, non-respect des signalisations ou d’un contrôle routier, délit de fuite…)

Régulièrement, un accident tragique plus médiatisé qu’un autre vient relancer le débat sur la sécurité routière et de nouvelles infractions sont envisagées pour prévenir les accidents et sanctionner les conducteurs considérés comme irresponsables.

Tout récemment, en juillet 2023, le gouvernement a annoncé une nouvelle infraction d’ « homicide routier » dans les cas d’accidents mortels impliquant un conducteur sous l’emprise de stupéfiant ou d’alcool, ou encore roulant à une vitesse excessive notamment.

Cette nouvelle infraction va-t-elle révolutionner la matière ? Sans doute pas !

En réalité, le droit français prévoit aujourd’hui que « Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. » (article 221-6 du code pénal)

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En clair, ne pas respecter les panneaux de signalisation, ne pas ralentir aux intersections, ne pas prêter attention aux conditions de circulation pour adapter sa vitesse, ne pas entretenir son véhicule ce qui cause un défaut de maîtrise… tous ces exemples, s’ils entrainent un accident causant le décès d’un autre usager de la route, sont les éléments constitutifs d’un homicide involontaire.

Le conducteur n’avait pas l’intention de causer un accident, mais du fait de son attitude irresponsable, c’est arrivé et les conséquences sont tragiques.

Cet article couvre également les accidents causés par un conducteur qui a volontairement consommé de l’alcool ou des produits stupéfiants avant de prendre le volant ou quand il roule à une vitesse excessive en application de l’article 221-6-1 du code pénal qui prévoit des circonstances aggravantes.

Lien : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000031927877

Et c’est bien là que le bât blesse !

Pour les victimes indirectes (les parents de la victime décédée) de ce type d’accident comment imaginer considérer que le conducteur a involontairement causé la mort de leur proche ?

Ne peut-on pas considérer qu’il y a, à minima, volonté de ne pas respecter la vie de celui que l’on croisera en chemin, lorsqu’on prend le volant en ayant bu au point d’émousser ses perceptions ou de perdre totalement la maitrise de son corps ou lorsqu’on a consommé des produits altérant de façon profonde (même si ce n’est que temporaire) notre analyse des situations nous entourant ?

C’est ainsi que le gouvernement l’analyse et propose une nouvelle loi instaurant l’infraction spécifique d’homicide routier.

Lien : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b1373_proposition-loi#

Qu’est ce qui va changer, si la loi est votée en l’état ?

La peine, mais sous certaines conditions seulement :

Aujourd’hui l’article prévoit : Les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende lorsque l’homicide involontaire a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article.

Demain le nouvel article prévoira : « Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121‑3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide routier puni de 10 ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende »

Toutefois, la peine sera augmentée en cas de cumul de circonstance aggravante, faisant passer l’infraction de délit à crime !

(Projet d’article : Les peines sont portées à quinze ans de réclusion criminelle et 200 000 euros d’amende lorsque l’homicide routier a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 7° du présent article.)

Quelles sont les les circonstances aggravantes ?

Les circonstances dans lesquelles l’article peut être appliqué restent inchangées puisqu’actuellement les circonstances aggravantes sont au nombre de 6 et sont les suivantes :

  • Violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité (par exemple, le feu rouge ou le stop grillé)
  • État d’ivresse manifeste ou était sous l’empire d’un état alcoolique
  • Le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiant
  • Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire (absence de permis, permis annulé, invalidé, suspendu ou retenu)
  • Vitesse excessive (dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h)
  • Délit de fuite

Seule une nouvelle circonstance viendrait s’ajouter : l’usage du téléphone portable (ou de l’oreillette Bluetooth)

Et puis, si l’on crée une infraction d’homicide routier,
pourquoi ne pas envisager la création d’un délit de « violences routière » en lieu et place des violences involontaires ?

En effet, le terme est couramment employé par les médias, mais il n’y a pas d’infraction spécifique prévue par notre droit.

L’article 222-19 du code pénal prévoit que « Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende. »

L’article 222-19-1 prévoit les mêmes circonstances aggravantes que pour l’homicide involontaire « Les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende lorsque l’atteinte involontaire à l’intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »

Réagir à l’émoi légitime des victimes et familles de victimes d’accidents mortels peut parfois créer un effet boule de neige qui pourrait contribuer à la création et la modification (légitime ou non et utile ou non) de plusieurs autres pans de notre droit pour créer un droit routier encore plus spécifique.

La question qui se pose régulièrement avec la sur-législation des dernières années tendant à créer un texte spécifique pour une situation d’actualité : la spécialisation des textes est-elle nécessaire alors qu’un texte général existe déjà.

La création d’infraction spécifique a le mérite de soulager la douleur des victimes, ou de rendre le droit moralement plus compréhensible… mais cela est-il le rôle du droit ?

Nous verrons ce que voterons nos représentants élus à ce sujet dans les prochains mois.

Affaire à suivre donc…

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